Monument aux Morts de Moulins
Monument aux Morts de Moulins et d’ailleurs : une illustration majeure du souvenir de la « Grande Guerre » 1914-1918
La guerre de 1914-1918 a fait plus de 18 millions de morts dans le monde. Après ce conflit si sanglant, la France se couvre de monuments aux morts financés par le pays mais aussi par des subventions privées. Tout le pays, sous le choc, communie lors d’un jour férié, le 11 novembre, et autour d’un symbole associé, le soldat inconnu. La joie de la victoire est vite oubliée. Seuls restent le chagrin et la litanie des noms de ceux qui ne sont pas revenus ; les survivants n’ont de cesse de commémorer les disparus. A vrai dire, les monuments aux morts préexistaient à la Grande Guerre et ceux liés à la guerre de 1870 constituent les premiers exemples de monuments rendant hommage aux soldats quel que soit leur rang. Pour la plupart, il s’agit d’œuvres uniques. En 1872, la loi des vainqueurs allemands avait réglé la question des tombes militaires des deux camps dans les départements annexés d’Alsace Lorraine. Du reste, certains monuments de cette douloureuse période furent détruits ultérieurement pendant la première ou seconde guerre mondiale. A Moulins, sur le monument ne figure à posteriori que la plaque de trois combattants anonymes français tués lors de ces combats et enterrés plus tard à cet endroit.

La Grande Guerre, à l’inverse fait surgir dans tout le pays, dès 1922, un hommage national unanime aux Poilus. Des monuments sont érigés partout dans les 36 000 communes, villes ou modestes villages français, à l’exception rarissime de celles qui ne comptaient aucun mort… De manière annexe, ces initiatives furent aussi, en dépit de dramatiques circonstances, à l’origine d’un fructueux commerce (relaté par Pierre Lemaitre dans son superbe roman qui reçut le prix Goncourt 2013 « Au revoir là-haut », adapté ensuite au cinéma). Dans chaque localité du pays ont vécu et travaillé des soldats défunts. Il apparaît donc logique que chacun des morts de cette hécatombe ait droit à son nom gravé publiquement pour que l’on puisse honorer sa mémoire et se recueillir puisque la majorité d’entre eux était enterrée sur les champs de bataille, voire dans l’anonymat d’un ossuaire, leur identité ayant été ensevelie sous la terre et le feu des armes. Si le monument aux morts est un tombeau vide, il est un lieu indispensable de l’identification qui évite ainsi l’oubli par la collectivité, et réconforte parents et amis. De ce fait, juridiquement, ces monuments sont des biens communaux et relèvent de la compétence des municipalités. Leur emplacement n’est pas anodin et souvent sous tendu par des considérations religieuses voire politiques. Les communes très pratiquantes, vraisemblablement comme ce fut le cas à Moulins, ont édifié leur monument près de l’église tandis que la place publique, la mairie ou l’école sont davantage privilégiées dans les communes laïques. L’architecture, le choix du sculpteur et du graveur ont une signification. Souvent, comme à Moulins, on privilégie une stèle simple, ou un obélisque tout en sobriété pour illustrer le deuil et la souffrance, mais aussi parce que leur construction s’avère moins chère. Certaines communes choisissent des commandes permettant d’exalter l’héroïsme de ceux qui sont morts pour la patrie, se tenant debout et fiers, un drapeau à la main avec, à leurs pieds, leur veuve en pleurs… Quelle que soit l’apparence, un principe d’égalité demeure, à savoir que les combattants défunts sont présentés par ordre alphabétique et classés par années. Les officiers gardent leur grade transcrit mais toujours en respectant cet ordre. Ce principe sera, du reste, poursuivi pour les conflits ultérieurs, comme on peut le lire sur le monument de notre commune, qu’il s’agisse de la deuxième guerre mondiale ou des guerres d’Indochine et d’Algérie.
A Moulins, comme dans toutes les communes de France, ces monuments aux morts, souvent mal connus en dehors des cérémonies patriotiques, sont les témoins de l’histoire collective mais surtout locale, traduisant le poids des guerres quand ils ne sont pas aujourd’hui la seule trace de certaines familles.